Erasmus+ 2018 : stage sur le management à Gouda en décembre 2018

Deux professeurs du lycée Nadar (G. Barré, Pr de Maths-Sciences, et B. Vignal, Pr de Maths-Sciences) ont participé à un séjour à Gouda (Pays-Bas) du 3 au 7 décembre dernier, afin de suivre un stage sur le thème du management.

« Une prise de recul sur nos pratiques »
Baptiste Vignal, professeur de Maths-Sciences au lycée Nadar

Cette ville de 70 000 âmes située à 25 km au nord-est de Rotterdam a des allures de village. Comme souvent aux Pays-Bas le centre-ville semble dépourvu de voitures et le parvis de la gare est rempli de vélos en stationnement sur deux étages. Le calme y est malgré tout troublé par les carillons des nombreux édifices religieux du centre historique.

Nous allons vite nous en rendre compte, parcourir ce centre historique entouré d’un canal principal ne nécessite effectivement pas de transport particulier tant le traverser dans n’importe quel sens ne prend que tout au plus dix minutes. Et comme tous les commerces et restaurants ainsi que notre hôtel sont accessibles à pied, notre séjour allait également nous permettre un petit décrassage avant de pouvoir déguster les plats locaux qui tournent, bien entendu, autour du fromage local. Mais j’ai pu également déguster ce que notre hôte appelait humoristiquement le « Dutch Sushi » et qui n’est rien d’autre qu’un hareng cru éviscéré et décapité.

Notre formateur, Yvor Broer, nous invita en bon maître de cérémonie à partager avec tous les participants un verre afin de nous découvrir mutuellement et briser la glace pour faciliter les échanges au cours de la formation qui débuterait le lendemain. Nous avons pu ainsi faire la connaissance d’une délégation irlandaise, venant d’un lycée de garçons du nord de Dublin, composée de Ciaran O’Hare, le proviseur, de Catherina Mc Nicholas, son adjointe, Sharon Hickey, professeur de mathématiques, et enfin Jessica Peavoy, professeur de langues dont le Français. Une autre délégation, anglaise, cette fois-ci, était composée de Jose C. Mejia, Niazy Hazeldine et Julie Scullion, tous trois membres de Metrocharity, une association qui s’occupe de la défense des droits et de la prévention pour le mouvement LGBT. Kajsa Robin, Suédoise, Laura Conti et Domitilla Cardinal, Italiennes de Rome, représentaient elles aussi une association du même type dans leur pays.

Le groupe a échangé et participé à la formation dans une très bonne dynamique d’écoute et de respect mutuel, ce qui a facilité le partage ainsi que l’empathie nécessaires à ce type de formation. Les membres du groupe dont l’anglais est la langue maternelle se sont adaptés afin de faciliter la compréhension de tous. Nous avons même fini par un atelier à trois avec Niazy Hazeldine, qui a accepté de ne parler qu’en français, langue qu’elle avait étudiée à l’université mais rarement pratiquée. Les conseils reçus et le temps de réflexion permis par une telle formation permettent d’avoir un réel recul sur nos pratiques et d’envisager différemment certaines situations de travail habituelles.

Je conseillerai à tous, si la barrière de la langue n’est pas trop grande pour vous (je vous rassure, Cieran m’a confié lors d’un dîner avec tout le groupe que j’étais avec mon accent la caricature du Français mais qu’il me comprenait très bien), de partir dans ce type de formation, rafraîchissante et enrichissante tant les échanges avec nos contemporains Européens permettent de prendre du recul et d’ouvrir l’esprit sur de nouvelles idées.


«  La découverte de métiers et de méthodes d’enseignement ou de recrutement d’enseignants différents »
Gwenhael Barré, professeure de Maths-Sciences au lycée Nadar

Des circonstances particulières m’ont permise de bénéficier, au pied levé, du programme Erasmus + pour la mobilité des personnels de l’enseignement scolaire, pour une formation à Gouda sur le management.

En quelques heures, les démarches étaient lancées, les papiers signés, les billets de train en ma possession. Mais mon cerveau n’avait pas encore fait toutes les connections nécessaires. Le départ était pourtant dans quatre jours.

Partagée entre l’excitation du séjour et mon inquiétude sur le fait de pratiquer une langue que je n’utilise pour ainsi dire jamais, je me rassurais en pensant que, au moins, je partais avec un collègue avec qui je m’entends bien, Mr Baptiste Vignal. Lundi matin, rendez-vous au lycée où nous retrouvons une collègue, Mme Justine Guérin, qui a accepté de nous déposer à la gare de Juvisy.

Let’s go ! Quelques heures plus tard, j’avais changé deux fois de pays et mon téléphone avait changé deux fois de réseau. De la Belgique, je n’ai vu qu’un quai de gare. De la Hollande, je découvrais un quai à Rotterdam, un autre à Gouda puis des garages à vélos. Des dizaines, voire des centaines, de vélos. Ok ! J’étais bien arrivée.

Je suivais mon collègue aveuglément jusqu’à l’hôtel où nos chambres nous attendaient : De Utrechtsche Dom Guesthouse. J’ai vainement tenté de prononcer le nom pendant cinq jours. En vain. Sauf le dernier mot. L’hôtel était charmant, avec une petite cour intérieure. L’hôtelier nous donna un plan et nous montra les endroits importants de la ville : le lieu où aurait lieu la formation, les restaurants et les bars.

On avait rendez-vous, dans la soirée, dans un bar avec tous les participants et le formateur, Mr Yvor Broer.

Avec suffisamment d’avance, on décida de faire le tour de la place centrale de Gouda et des rues adjacentes, soit la moitié de la ville.

Gouda est une petite ville entourée et traversée de canaux. Les maisons ont presque toutes des façades pittoresques. Une véritable carte postale. Je continue de penser que cette ville a été conçue pour le tourisme et que les maisons ne sont qu’un décor de cinéma.

Sur la place principale, la Markt, on choisit un restaurant où on mangea en terrasse malgré le froid : parasols chauffants et plaids à disposition. Et pour rester dans l’ambiance locale, on choisit des plats à base de gouda. Ce restaurant, avec ses spécialités, deviendrait notre principale cantine pendant le séjour.

Arriva enfin la rencontre avec le formateur et les autres participants. Nous n’étions ni les premiers, ni les derniers arrivants. Et voilà le moment tant redouté de faire des phrases de plus de trois mots en anglais ! Yvor se présenta à nous et Baptiste l’informa de mon petit niveau en anglais. J’arrivais à baragouiner quelques mots et comprendre globalement ce qu’on me répondait, malgré le bruit ambiant.

Nous étions douze inscrits à la formation : une Danoise, deux Italiennes, trois Anglais et quatre Irlandais, en plus de mon collègue et moi. Les stagiaires des trois premières nationalités étaient membres d’association, notamment de défense des droits LGBT. Les Irlandais étaient dans l’enseignement : trois enseignantes, dont une de français, et leur directeur. On se sépara après des présentations assez sommaires et ce fut le retour à l’hôtel.

La formation commençait le mardi matin. On fit un nouveau tour de table pour se présenter puis commencèrent les explications d’Yvor sur le déroulement de la semaine et les premiers échanges. Un voyant rouge commença à clignoter dans ma tête. Les phrases s’enchainaient et, la plupart des participants étant anglophones, à une vitesse que mon cerveau gérait difficilement. Je commençais à perdre le fil des discussions. J’ai dû faire des efforts de concentration incroyables pour saisir le sens global des échanges. En fin de matinée, je percevais l’idée globale.

Pendant les quatre jours, on alternait entre l’écoute d’Yvor et les interventions des uns et des autres ainsi que des travaux d’échanges par groupe de deux à quatre personnes. Les travaux par groupes ont été pour moi les plus intéressants. A deux reprises, je me suis retrouvée en binôme avec Jessica, la professeure de français de l’école irlandaise. Tous nos échanges se faisaient malgré tout en anglais et elle me corrigeait si nécessaire.

Elle me raconta son parcours professionnel. D’abord enseignante dans un lycée qui ressemble à nos lycées professionnels avec des élèves des deux sexes et mixant des nationalités différentes, elle avait postulé pour son actuel établissement, privé et accueillant uniquement des garçons, grâce à une seconde corde de son arc : le gaélique.

Toute nouvelle dans son établissement, elle avait une fonction supplémentaire : manager les équipes, en partenariat avec sa direction, pour les amener à moderniser leurs méthodes d’enseignement. C’était son challenge à elle, et c’était très intéressant de pouvoir comparer nos méthodes de travail, nos « types » d’élèves, nos expériences professionnelles, d’échanger sur des cas particuliers rencontrés avec certains de nos élèves…

J’ai pu échanger également avec Jose, Londonien originaire de Colombie, qui travaille dans une association, Metrocharity. Il intervientparticulièrement auprès des communautés LGBT et de migrants, notamment sur la question du VIH.

J’ai eu l’occasion d’échanger avec chacune des Italiennes : Domitilla et Laura. Elles travaillent toutes les deux dans une association de défense des droits de la communauté LGBT. Le hasard a voulu que Domitilla soit également professeure de mathématiques à Rome.  Là aussi, j’ai pu comparer nos expériences professionnelles.

Au fur et à mesure de ces quatre journées, je découvrais des métiers différents du mien ou des méthodes d’enseignement ou de recrutement d’enseignants différentes de celles de mon pays.

Je constatais que, tous métiers confondus, le problème majeur était celui de la communication : entre collègues, entre services et/ou avec nos responsables. Comment se faire entendre, comprendre, accepter ? Comment dire, ou entendre, certaines choses sans froisser les susceptibilités des uns et des autres ? Comment tenter d’intégrer certaines personnes dans un processus envers lequel elles sont parfois réticentes ?

Et, finalement, ces questions se posent également entre un enseignant et ses élèves : comment les amener à faire ce qu’ils n’ont pas envie de faire ? Je suis suffisamment réaliste pour savoir que mes élèves ne se lèvent pas le matin en se disant : « Youpi ! Aujourd’hui, je vais résoudre des équations. » Je songe à adapter certains des ateliers proposés par Yvor avec mes élèves… A voir ! C’est facile d’écrire ça ici mais, quand je vais leur demander comment eux, aimeraient travailler, je crains de vite déchanter.

De ma semaine goudienne, je retire également une satisfaction personnelle. Si les rouages de mon cerveau ont mis un moment à s’enclencher, j’ai pu avoir de véritables conversations en anglais, malgré la difficulté de compréhension des accents latins pour les uns et irlandais pour les autres. L’accent irlandais a été mon plus grand défi linguistique. Et, quand le directeur de l’école irlandaise m’a félicitée pour mon accent, je crois que j’ai eu le plus gros melon de ma vie ! En fait, je l’ai toujours.

Le départ de Gouda fut morose et pluvieux. Même mon téléphone rechignait à rechanger deux fois de réseau. Mais ces quelques jours ont été dépaysants, intéressants, enrichissants et même surprenants. Je ne mettrai pas d’autres adjectifs en « ant », c’est suffisant.

Je suis reconnaissante d’avoir été invitée à prendre la place vacante pour ce séjour et ravie de cette expérience, des rencontres faites, des échanges et du défi personnel réalisé.

 

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